William Turner, 1775 - 1851
Lorsque l'on pense aquarelle, on pense à Turner, l'un des peintres dont les oeuvres ont conduit cette technique à acquérir ses lettres de noblesse.
Joseph Mallord William Turner voit le jour à Londres le 23 avril 1775, au sein d'une famille modeste. Il est très tôt attiré vers les Beaux-Arts et, dès l'âge de 14 ans, son carnet de croquis ne le quitte plus, parcourant avec lui landes et campagnes, recueillant ses multiples dessins. De 1789 à 1793, il suit des cours à la Royal Academy et est l'élève du paysagiste Thomas Malton. Durant ses études, il réalise de nombreuses copies d'oeuvres existantes pour de riches commanditaires.
A partir de 1792, Turner entreprend de nombreux voyages en Angleterre, au Pays de Galles et en Ecosse. Il réalise alors diverses aquarelles représentant paysages et marines.
William Turner, "Dolbarden Castle". Aquarelle & crayon, 1799. Tate Gallery, Londres.
Quatre ans plus tard, Turner expose ses oeuvres, principalement des sujets historiques représentés au sein de paysages romantiques, baignés de ces jeux de lumière qu'il affectionne tant, à la Royal Academy. A l'âge de 27 ans, il est déjà élu académicien titulaire, ce qui est peu commun à l'époque. L'artiste est en effet connu et reconnu, il vit dans l'aisance et le succès constant, ce que peu de peintres connaissent alors de leur vivant, et ouvre sa propre galerie en 1804.
A partir de 1802, Turner entreprend de multiples voyages à travers l'Europe, notamment en France (à Calais et ensuite à Paris, où il étudie les maîtres anciens au Musée du Louvre) et en Suisse (dans le Piémont). Il en rapporte de nombreuses aquarelles mais aussi un intérêt nouveau pour des artistes tels Claude Lorrain et les scènes mythologiques. Il commence donc à s'intéresser à la peinture de genre, comme le montre sa fresque antique "Didon construisant Carthage", réalisée en 1815.
William Turner, "Didon construisant Carthage" (L'Ascension de l'Empire Carthaginois). Huile, 1815. National Gallery, Londres.
En 1807, il devient professeur de perspective à l'Académie et s'inspire du "Liber Veritatis" de Claude Lorrain pour publier la première partie de son "Liber Studiorum" (1807 - 1819), une série de représentations à la plume et au lavis mêlant observation rigoureuse de la nature et évocation mythologique.
En 1819, Turner effectue un premier voyage en Italie, au Campo Santo de Venise, qui va marquer un tournant important dans son oeuvre, l'artiste passe ainsi d'une représentation réaliste à celle des effets de lumière, les tonalités chaudes du spectre des couleurs étant de plus en plus présentes dans ses réalisations.
En 1826, Le peintre effectue un long voyage à travers la France, remontant la Loire de Nantes à Orléans, carnets de croquis et d'aquarelle en main. Il réalise alors des représentations de plus des 40 villes et lieux qu'il a parcourus et peint de magnifiques huiles qui seront exposées à la Royal Academy en 1927. En 1831, un ouvrage reprenant 21 oeuvres sur ce thème et intitulé "Le Tour Annuel de Turner" est publié.
Entre 1829 et 1837, l'oeuvre de Turner évolue encore, il utilise le pouvoir suggestif de la couleur, s'éloignant des représentations rigides et figuratives pour se rapprocher de l'atmosphère évoquée dans ses oeuvres : des formes dissolues et encensées d'ondées lumineuses. Cette caractéristique le place comme un précurseur de l'impressionnisme (40 ans avant Monet) mais suscite l'incompréhension de ses contemporains, qui parleront même des "folies de Turner".
William Turner, "L'Incendie du Parlement, le 16 octobre 1834". 1835. Philadelphia Museum of Art.
En 1833, L'artiste effectue un second voyage à Venise et en revient avec des oeuvres fortes, telle "La Dogana et Santa Maria della Salute, Venise". Il y retournera une dernière fois en 1840. Au mois de juin de cette même année, il rencontre John Ruskin, un sociologue et critique d'art, qui sera, jusqu'à bout et même au-delà, un fervent défenseur de son art.
William Turner, "La Dogana et Santa Maria della Salute, Venise". 1843. National Gallery of Art, Washington D.C.
En 1844, il expose "Pluie, vapeur et vitesse, le chemin de fer de la Great Western" à la Royal Academy, une oeuvre à laquelle les impressionnistes s'intéresseront de près, frappés par son style et sa modernité.
Turner, incompris et totalement dévoué à son art, d'un naturel taciturne, décide de rompre toute relation avec le monde qui l'entoure et quitte la vie publique à partir de 1846. Il déménage dans un quartier de Chelsea et y passe les dernières années de sa vie, sous une autre identité, dans la solitude la plus totale, inconnu même de sa logeuse. Il décède le 19 décembre 1851.
A peine 10 ans après son décès, la première galerie entièrement consacrée à l'artiste ouvre ses portes dans l'aile ouest de la National Gallery.